L’Instrument de travail pour le synode d’octobre 2018 est sorti

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L’Instrument de travail pour la XVe Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques est sorti ! Un beau texte, riche et stimulant sur « Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel » (3-28 octobre 2018)

Instrumentum laboris

L’introduction présente d’abord concrètement les objectifs du synode et donc son enjeu majeur : un « prendre soin » des jeunes à considérer comme central et inhérent à la mission de l’Église. Puis est évoquée la méthode de discernement ainsi que la structure de ce texte dont le mouvement construit autour de la dynamique même du synode – un chemin ensemble à l’écoute de l’Esprit – déploie une démarche de discernement qui passe par les trois étapes déjà décrites dans le document préparatoire : reconnaître, Interpréter, Choisir.

 

La partie I intitulée « Reconnaître :

l’Eglise à l’écoute de la réalité » qui intègre une analyse sociologique et anthropologique est très réussie. Elle décrit bien la réalité actuelle du monde dans lequel les jeunes sont plongés. Le regard posé sur la jeunesse s’appuie beaucoup sur le document final du pré-synode très souvent cité, mais aussi sur les réponses des conférences épiscopales et sur les résultats de l’enquête directe réalisées auprès des jeunes enrichies par d’autres références. La photographie du monde des jeunes déployée ici articule bien à la fois la prise en compte de la diversité des contextes et le repérage des éléments de la culture globale. Tous les éléments importants concernant la vie des jeunes sont pris en compte. On pourra noter en particulier les développements intéressants et importants sur le sport et la musique aux §36-40 ainsi que tout le paragraphe sur le corps, l’affectivité et la sexualité, sujets qui n’avaient pas été abordés en tant que tels dans le document préparatoire. On retrouvera par ailleurs les thématiques chères au Pape François autour de la question de la famille, des études et du travail mais aussi une description fine et pertinente de la difficulté actuelle des jeunes à poser des choix dans un contexte social d’aujourd’hui marqué par la « liquidité », la pluralité et la multiplicité des possibles.

La partie II qui correspond à la deuxième étape du parcours de discernement proposé « Interpréter : la foi et le discernement vocationnel » est plus spirituelle. Elle commence par un éclairage biblique inspirant sur la jeunesse. On pourra particulièrement se réjouir de l’approche très large donnée au sens du mot vocation avec une définition qui permet de bien clarifier le terme, ce qui était attendu. Cela invite vraiment à voir la pastorale des vocations non pas comme une pastorale des vocations spécifiques restreinte à l’appel à devenir prêtreou entrer dans la vie consacrée mais comme la manière même d’évangéliser les jeunes en les accompagnant dans le discernement de tous leurs choix. Cela consonne avec l’accent donné depuis plusieurs années sur l’enjeu de développer une culture des vocations enracinée dans la prise de conscience que toute vie est vocation – vocation à l’amour – et que l’Eglise-Ekklesia, communauté d’appelés pour appeler, est par nature vocationnelle. Au fondement de la vie chrétienne se trouve mis ici en lumière la vocation baptismale qui est intrinsèquement vocation missionnaire. C’est pourquoi comme cela est bien exprimé au §99 « les différentes formes de la vie chrétienne ne peuvent donc pas être pensées ou comprises de manière autonome, mais seulement dans la réciprocité et dans l’échange des dons qu’elles réalisent entre elles ». Après un long développement sur le dynamisme du discernement vocationnel au chapitre 3, on s’arrêtera en particulier sur le beau chapitre 4 intitulé « l’art de l’accompagnement » qui décline la notion d’accompagnement dans toutes ses dimensions. Cela résonne bien avec ce que nous percevons particulièrement sur le terrain d’une nécessité et d’un grand besoin de formation à l’accompagnement des acteurs pastoraux pour continuer à développer cette posture clé pour l’Église déjà bien mise en lumière avec les synodes sur la famille et Amoris Laetitia.

Dans la partie III « Choisir :

trouver des chemins modes de conversion pastorale et missionnaire » on retrouve toute la dynamique missionnaire donnée par le Pape François et sa vision d’une « Église du dialogue » qui met au centre la « culture de la rencontre ». Il est vraiment intéressant de voir au début de cette partie l’accent mis sur une approche pastorale intégrale. Et on pourra s’arrêter en particulier sur le §140 qui propose la vocation comme pivot d’intégration de toutes les dimensions de l’identité. Nous pouvons y lire ce qu’on pourrait appeler le don de la vocation comme réponse aux quêtes d’identité contemporaines. D’où l’invitation à proposer aujourd’hui la vocation (au sens du discernement vocationnel) comme source de la construction d’une « identité intégrale » c’est-à-dire une manière de voir l’identité comme une dynamique toujours ouverte prenant en compte toutes les dimensions de la personne.

Sont ensuite déclinés au chapitre 2 tous les lieux et réalités de la pastorale ordinaire qui rejoignent la vie des jeunes. Est notamment soulignée l’importance du monde numérique, de la musique, du sport, et de l’amitié comme autant de lieux à travers lesquels l’Église peut rejoindre et accompagner les jeunes. Sans oublier la prise en compte de toutes les situations de fragilité et exclusion qui touchent les jeunes : le handicap et la maladie, les addictions, la prison, les situations de guerres et de violence, la migration, la mort. Les deux chapitres suivants insistent ensuite sur la nécessaire dimension communautaire de l’évangélisation et sur l’organisation et l’animation de la pastorale à penser comme une pastorale intégrée qui donne la priorité à la responsabilisation et à l’engagement des jeunes (ce qu’on appelle ici le « protagonisme » des jeunes). Ainsi, le §201 insiste sur l’enjeu de travailler en réseau et avec d’autres instances civiles. L’expérience actuelle en pastorale des jeunes nous montre en effet qu’un des points clés dans notre contexte français très sécularisé est le travail en réseau et en  partenariat pour collaborer avec d’autres non seulement hors de l’Eglise mais aussi à l’intérieur de l’Eglise. Est ainsi bien souligné au §203 l’enjeu de toujours mieux articuler paroisses/diocèses et mouvements/communautés dans une Eglise-communion qui se fait toujours plus inclusive.

En conclusion est soulignée la vocation universelle à la sainteté qui concerne tous les jeunes. On peut remercier le Pape François d’avoir publié Gaudete et Exsultate avant la fin de la rédaction de l’Instrumemtum Laboris ! En effet cette exhortation apostolique qui met en lumière l’appel universel à la sainteté est plusieurs fois citée et s’inscrit sans doute comme un apport essentiel sur ce chemin de préparation synodale. On voit bien toute la cohérence qui se déploie à travers les paroles, écrits et actes du pape François au fil de ces cinq années de pontificat. Nous est donné de percevoir de plus en plus clairement l’étape nouvelle de la réception de Vatican II à laquelle la culture contemporaine – dont les jeunes sont particulièrement porteurs – nous appelle quand on lit « les signes des temps ». On peut ici relire le n°108 d’Evangelii Gaudium particulièrement éclairant « … chaque fois que nous cherchons à lire les signes des temps dans la réalité actuelle, il est opportun d’écouter les jeunes et les personnes âgées. Les deux sont l’espérance des peuples. Les personnes âgées apportent la mémoire et la sagesse de l’expérience, qui invite à ne pas répéter de façon stupide les mêmes erreurs que dans le passé. Les jeunes nous appellent à réveiller et à faire grandir l’espérance, parce qu’ils portent en eux les nouvelles tendances de l’humanité et nous ouvrent à l’avenir, de sorte que nous ne restions pas ancrés dans la nostalgie des structures et des habitudes qui ne sont plus porteuses de vie dans le monde actuel. ». Cela nous fait pressentir l’importance de ce synode des jeunes, non seulement pour les jeunes, mais aussi pour l’Eglise toute entière et pour le monde.

En effet, si l’Eglise écoute bien les jeunes et discerne plus finement à travers eux les « signes des temps », elle continuera à se réformer pour servir davantage le monde et contribuer à sa transformation positive. Car une des grâces du Pape François à travers ce synode est sans doute de nous faire davantage saisir que les jeunes s’ils sont bien guidés et en dialogue avec les ainés sont aujourd’hui les premiers acteurs de la transformation du monde nouveau en émergence vers plus de justice, de paix et de fraternité.

 

Sœur Nathalie Becquart, Xavière, Directrice du Service national pour l’évangélisation des jeunes et pour les vocations (SNEJV)

Source: https://eglise.catholique.fr